samedi 26 janvier 2013

Mais qu’est-il donc advenu de la belle éloquence d’antan?


Ah là là, décidément, la vie n’est plus ce qu’elle était. D’ailleurs, je ne suis pas le seul, mon père, ma mère, les leurs, leurs grands-parents, leurs tantes, leurs oncles sans doute, et aussi les vôtres, bref, tout le monde le dit et, de toute façon, la vie fut-elle jamais ce qu’elle eut été si elle fut demeurée telle qu’elle était? Non mais… sans blague, fut-il jamais quoi que ce soit qui resta tel qu’il fut, de tout temps, sinon futile justement? Voilà bien une tournure d’esprit, une pente cérébrale, devrais-je dire, qui me jette invariablement dans une gadoue intellectuelle pas possible. Une sorte de néant en somme, engluant, mais sans la nausée salvatrice. D’ailleurs, je suis là à dire « je » comme si vous-même, et tous ces gens abattus que je croise sur nos trottoirs pouilleux, n’étiez pas aussi dans une neurasthénique mélasse. Y a qu’à sonder quelques regards… Heureusement qu’il reste encore des types comme Tonneau, tiens! Lui, pas de doute, il est ce qu’il était et ça, depuis toujours, en tout cas pour ce que j’en sais.

Ici vous savez, c’est le Pays des Côtes. Et Tonneau, eh bien, Tonneau lui, c’est le plus époustouflant des grimpeurs de côtes que vous ayez jamais vu. Rapide… vous pouvez pas imaginer! D’abord, faut bien dire ce qui est, il a les jambes pour : une jambe toute petite, enfin, je veux dire courte, parce que côté muscles alors là attention, béton!; et puis l’autre jambe, toute en longueur, avec un de ces mollets… Une espèce de crabe humain asymétrique, avec un corps tout ramassé, un torse rond et au-dessus, qui flotte dans le flou d’une invraisemblable tête, un sourire béat, dégoulinant… la sagesse en personne quoi! Celui-là, il ne lui en faut pas des masses pour jubiler; il se contente de peu comme on dit. Seulement voilà, c’est vite dit ça « peu », parce que bon d’accord, il ne subsiste certes avec si peu qu’on se demande où il puise son dynamisme sans faille; mais en contrepartie il a absolument tout son temps Tonneau, fait ce qu’il veut de ses journées… Alors, évidemment, y en a que ça énerve de le voir mensuellement encaisser son chèque dérisoire, en grappillant ici et là pour maintenir ses rondeurs, sans rien de plus à foutre qu’à être, ce en quoi justement il excelle. Être et se taper pedibus des kilomètres de côtes, un sourire bavochant au coin de la gueule. Non ça, y a des gens qui ne supportent pas. C’est comme ça, on n’y peut rien.

Évidemment, dans notre beau pays tout en côtes, on préfère de très loin La Foucasse; ah celle-là, elle est ri-gou-reu-se-ment irréprochable sous tous rapports et en plus, on peut également dire d’elle sans risque d’erreur qu’elle ne fut jamais que ce qu’elle est, ce qui la place indubitablement sur un pied d’égalité avec Tonneau pour ce qui est d’être ce que d’aucuns voudraient que la vie soit, de ce point de vue tout au moins… Quoi qu’il en soit, c’est incontestablement à eux deux que l’on doit d’avoir vu renaître en notre beau pays tout en côtes, au moins une fois, cette noble tradition qui autrefois opposait en de grandioses débats les non moins grandioses esprits de leur temps qui, hélas, n’est plus le nôtre, amen. Oui, parce que La Foucasse et Tonneau, c’est l’eau et le feu, sauf que c’est le feu, curieusement, qui essaie d’éteindre l’eau…

Voici donc où-quand-comment eut lieu cette mémorable escarmouche verbale. Mais d’abord, que je vous dise un peu quand même à quoi elle ressemble, La Foucasse.

Eh bien, La Foucasse voyez-vous, non seulement ne manque-t-elle pas d’air, mais si jamais quoi que ce soit parvient malgré tout à l’étouffer, ce ne sera certainement pas la modestie. À l’en croire, ainsi que ses innombrables disciples, elle serait l’archétype même de la plus pure Sainteté. Mais attention, pas le modèle « sainte au ravissement bonasse », non, non, elle fait carrément dans l’austérité la plus flagellante, La Foucasse; le Bien, elle vous l’enfoncerait plutôt dans la gorge en tassant le tout avec le pain rassis de la Contrition, si vous voyez ce que je veux dire… Avec ça, histoire de bien mettre en perspective toute la grâce de son âme sans pareille, elle est bossue, flétrie, râpeuse comme du sable sur la langue, avec une gueule à la Kierkegaard, le tout couronné d’un petit tas de brindilles filasses et elle vous éructe les pestilences de sa bonne parole dans le nez en battant le sol de son pied bot. Son charme transcendant n’en demeure pas moins grandement apprécié de notre petite communauté en raison, sans doute, de l’incessant dévouement de La Foucasse, de son inépuisable énergie consacrée sans relâche à soulager de leurs inénarrables souffrances les malades et les plus démunis. En d’autres termes, on est loin d’un jean-foutre à la Tonneau, qui traînaille toute la journée, glandeur rigolard barricadé dans la quiétude suspecte de son quant-à-soi, ce qui est du moins l’opinion la plus répandue dans notre beau pays tout en côtes…

Ainsi donc, fatalement, ce fut au sommet de la plus abrupte de nos côtes qu’eut lieu cet affrontement inoubliable entre nos deux sublimes idéologues. (C’est pas mêlant, si je me retenais pas, je dirais que c’était écrit; mais de toute façon, ne vous en faites pas, ça va l’être, ça va l’être…) Par un de ces après-midi bien cuisants de juillet, alors qu’il arpentait de bas en haut la tortueuse rue des Hêtres, Tonneau, suivi comme à l’accoutumée de quelques curieux, la plupart en culottes courtes et nettement essoufflés malgré la ferveur de leur jeunesse encore toute fleurie; Tonneau dis-je, aperçut tout en haut de la rue La Foucasse en personne, superbe d’immobilité vertueuse, entourée de ses fidèles disciples ployant sous l’admiration. En trois coups de cuillère à pot, Tonneau était en haut, pas plus dépeigné que d’habitude, son sourire salivant laissant filtrer un souffle égal à fragrance de ferment. Il fut aussitôt accueilli par cette stridulante interpellation de La Foucasse : « Ainsi donc, on ne m’avait pas menti. Tu oses encore traîner à la face des justes ton immonde carcasse, ô toi, mon infâme Tonneau! »

Diable, la voilà qui se lançait sur le mode antique… Eh bien, soit!

TONNEAU
Est-ce bien à moi, ô toi La Foucasse, qu’ainsi tu t’adresses?

LA FOUCASSE
À qui d’autre m’adresserais-je en usant de ton nom?

TONNEAU
En effet, mais dis-moi, n’appelle-t-on pas rond ce dont les extrémités sont partout à égale distance du milieu?

LA FOUCASSE
Heu… mettons…

TONNEAU
Et droit ce dont le milieu est en avant d’une des deux extrémités et derrière l’autre?

LA FOUCASSE
Attends voir… oui, oui, il me semble bien.

TONNEAU
C’est donc bien à moi que tu t’adresses.

LA FOUCASSE
Je ne vois pas le rapport???

TONNEAU
Franchement, moi non plus. Mais qu’importe puisque somme toute, je dis la vérité.

LA FOUCASSE
Comment? Toi, immonde roteur, torchon imbibé, toi, dire la vérité? Sache, bestiole sans nom, que la vérité n’appartient qu’à celui qui la mérite!

TONNEAU
Bien parlé, La Foucasse. Considère donc comment je vais me défendre; car, faute de prêter attention aux termes généralement employés pour affirmer ou nier, on s’expose à admettre des absurdités plus graves encore que celles que nous avons déjà admises. Je vais donc te poser la question redoutable…

LA FOUCASSE
Je t’en prie.

TONNEAU
N’as-tu pas prétendu t’adresser à moi en usant de mon nom?

LA FOUCASSE
C’est exact.

TONNEAU
Alors, réponds donc à ceci…

LA FOUCASSE
Accouche, simonaque!

TONNEAU
Eh bien voici… Dis-moi, La Foucasse, te considères-tu comme une personne « méritante » et, dans ce cas, en possession d’une quelconque vérité?

LA FOUCASSE
Certes oui!

TONNEAU
Dirais-tu alors que celui qui possède la vérité peut user de ce qui n’est pas ou dirais-tu plutôt qu’il ne le peut?

LA FOUCASSE
Évidemment, il ne le peut en aucune façon.

TONNEAU
Et dirais-tu, La Foucasse, de celui qui prétend cependant en user qu’il est méritant et possède la vérité?

LA FOUCASSE
Bien au contraire, je dirais qu’il n’est qu’un péteur de broue dans ton genre!

TONNEAU
Curieux…

LA FOUCASSE
Plaît-il?

TONNEAU
Ne m’as-tu pas traité, il y a quelques instants, de bestiole sans nom?

LA FOUCASSE
Je crois m’en souvenir, en effet.

TONNEAU
Bien que tu aies précédemment prétendu user de mon nom…

Au cours de ce bref échange, une masse de nuages sombres et écrasants avait rapidement envahi le ciel, portée par un vent friquet battant les frisettes défraîchies de La Foucasse. Une brèche dans les nuages laissait cependant filtrer un mince rayon de soleil et, par l’effet de cet éclairage improvisé, la bosse de La Foucasse s’estompa, son visage resplendit, angles et rides escamotés, sa main en un geste gracieux pointant la nue… Jamais pareille beauté ne se fit jour en notre beau pays tout en côtes mais, fâcheusement, personne ne le vit, chacun étant trop occupé à se tordre des pitreries de Tonneau. Aussi, lorsqu’elle prit la parole, tous ne virent que ce bon vieux laideron de La Foucasse : « Mais cesse donc de faire le zouave, lamentable parasite, et considère plutôt ton indécente inutilité; ça te fera ravaler tes beaux discours! Crois-tu que Dieu t’ait fait cadeau de l’existence pour que tu la passes à gravir une côte après l’autre en te fendant la gueule comme un débile? C’est de honte que tu devrais baver, inepte crapaud! À genoux, crabe vicieux, pénitence, PÉNITENCE! »

Et voilà… aux chiottes la Grèce antique…

À mesure qu’elle parlait, le sourire de Tonneau s’épanouissait dans sa grosse face burinée. « Ha! Mais oui, évidemment…  Tu touches là, ma chère La Foucasse, un point très important. En effet, si l’on peut en toute légitimité joindre l’utile à l’agréable, c’est franchement malvenu de joindre le pas regardable à l’inutile! Et pour ce qui est d’être pas regardable, sans pour autant prétendre rivaliser avec toi, je l’admets volontiers, je ne cède pas ma place. Quant à être un pur inutile… franchement, je m’interroge…  Qu’est-ce qui est le pire : un affreux qui se défile ou une horreur qui s’incruste? Parce que, reconnais-le, tu fais quand même payer assez cher les services que tu leur rends à tes « pauvres malheureux » en leur imposant à très forte dose ta sale gueule, sans parler de ton effroyable haleine. Tu sais bien, tous ces élans que tu enfermes en toi et qui pourrissent doucement au fond de ta gorge…  Et encore, s’il n’y avait que ça! Mais non, il faut en plus que… »

Tonneau n’eut jamais le loisir d’accoucher de la totalité de sa pensée. Un véritable déluge se déversa d’un seul coup sur le petit groupe qui se dispersa aussitôt en poussant des cris étouffés par le tumulte qui s’abattait impitoyablement sur eux. Seul Tonneau accueillit avec sa béatitude coutumière cette approbation aussi céleste qu’inespérée.

Il s’éloigna tranquillement, chantant (et clapotant) sous la pluie…




(Un merci tout particulier à Platon qui
a eu l’anachronique bonté de me
souffler quelques répliques…)

samedi 19 janvier 2013

La froide lumière du doute

nous aurions bonne mine
confondant le robinet et l’évier
unis par le vacarme grandissant
de quelque fuite négligée
ravissant à la nuit ses sombres murmures
pleins de confusion
soumis au charme discret des soucis
un menton volontaire pour toute arme
suprêmement visqueux
nous aurions bonne mine
étouffant sous l’ineptie
sans préavis
brusquement soumis
à la froide lumière du doute




vendredi 18 janvier 2013

Souffrir pour mieux écrire?


“These guys think you always have to be on the cross and bleeding in order to have soul. They want you half mad, dribbling down your shirt front. I’ve had enough of the cross, my tank is full of that. If I can stay off the cross, I still have plenty to run on. Too much. Let them get on the cross, I’ll congratuate them. But pain doesn’t create writing, a writer does.”
Charles Bukowski

(Tiré de : The captain is out to lunch and the sailors have taken over the ship, Black Sparrow Press, 1998)


mercredi 16 janvier 2013

Blue Tag


Voilà que Blue me propose (et à d’autres) un petit jeu… merde! Faut déjà que je mette la main sur un journal, moi qui m’étais juré de ne plus me salir les doigts, que de l’info virtuelle, ne se polluer que l’esprit… mais bon là, attention, c’est tout de même mon âme d’enfant qui est en jeu! Pfffffffffffffff… peux pas me défiler… bon, au retour du turbin, l’inconscient déjà en marche, je ramasse Le Devoir – et me tape forcément l’interminable attente au comptoir (je faisais la file moi enfant? ah mais oui : pour voir des films de monstres!), arrive chez moi déjà vanné avant même d’attaquer la vaisselle de la semaine dernière, histoire de me faire une petite place pour pouvoir bouffer, ah et puis zut! je balance une pizz surgelée au micro-ondes que je grignote en découpant soigneusement un paragraphe de la une (j’ai failli écrire « la lune ») choisi au hasard. Je suis aussi scrupuleusement que possible les instructions de monsieur Tzara, qui affirme tout de même que le résultat va infailliblement me ressembler (gasp! je vais devoir me dévoiler là en plus)… Et ça donne ceci :

suis particulier noms convives rencontrer bon présents mais autres l’identité La Cantina de souvenir M. Applebaum souvienne d’affaires raisons voulaient hommes douzaine a-t-il lesquelles en Zampino les je même différents aucun étaient pour des ni connaissait les pas personne avait plus les y n’a très dont qui ils je Frank que avec me élus la il de dit de là ne

Hum… j’ai vraiment l’air de ça? Pour ne pas être en reste, je prends le tout en photo. Mon appareil en profite pour disjoncter et me crache cette chose informe :



Mais où est passée mon âme d’enfant???

(En principe, je devrais aussi propager cette malédiction. Là, franchement, j’hésite… je ne tague que Kayou : il ne me connaît ni ne me lit et, en plus, il est immunisé.)

dimanche 13 janvier 2013

Imaginons...

Imaginons, contre un instinctif goût de vivre usé par les assauts incessants de la science dévastatrice et suicidaire, un pessimisme pratique et salutaire nourri d’un dégoût tonique pour toute phraséologie se présentant sous la forme d’un cul d’autruche.



vendredi 11 janvier 2013

Fait d’hiver


à la crête des vagues anonymes
de la foule se dessine parfois le
profil du cancer qui la mine

La neige poudreuse, cristalline, virevolte en spirales délicates, auréolant mes pas secs et craquants. La foule autour de moi est dense. Les gens sont pressés, têtes rentrées, collets remontés.

Au cœur de la masse uniforme des corps, j’aperçois la face grimaçante d’un homme, visage sans âge, ravagé par la misère. Sale, vêtu d’une simple chemise de coton usée, effilochée, ouverte sur une camisole jaunie, tachée, d’un pantalon battant au vent, presque transparent aux genoux, ses chaussures éventrées mordant la légère pellicule de neige qui s’accumule paisiblement, l’homme fend la masse des passants. Le regard fixe, chargé de haine, il hurle, serrant les poings par secousses, déversant sur l’humanité entière la bile écumante de son irrépressible rage.

Il foncera ainsi, glapissant des heures durant sans jamais reprendre son souffle tant est puissante, insoutenable, la poussée du cri de ses entrailles torturées. Autour de lui des êtres anonymes, indifférents, aveugles à tout ce qui n’alimente pas la mesquinerie des soucis quotidiens, confirmation ignorante d’elle-même d’une conspiration universelle contre tout homme incapable de contenir sa douleur…


lundi 7 janvier 2013

Celle-là est pour Mistral…

Quand le moral à zéro s’incruste un peu trop, par je ne sais quel charme paradoxal, il me suffit d’entendre la voix tonitruante de Morrison clamer cette simple strophe :

Well, I've been down so Goddamn long
That it looks like up to me


pour me voir illico ragaillardi. Plutôt qu’un constat désolant, j’y entends une sorte de triomphe par l’absurde qui, sinon avec la vie, me réconcilie invariablement avec moi-même…



dimanche 6 janvier 2013

« Autour de », le concept…

J’ai débuté par un texte que je désignais comme étant « autour de » Lie-Tseu. En fait, ce n’était pas qu’une façon de parler. Improvisateur avant tout, je me suis amusé à développer différents procédés (assez rudimentaires, j’en conviens) qui visent non seulement à « stimuler » la créativité, mais surtout à me surprendre moi-même, à m’extirper l’insondable en quelque sorte. (Rien de nouveau sous le soleil évidemment, l’adolescence de l’art dirons-nous….) Dans ce cas, il s’agit de bâtir un texte autour d’une citation, en usant de façon « automatiste » du vocabulaire de l’auteur cité, sans intention ou idée préconçue. Ça n’a donc que peu à voir avec le pastiche, ou toute forme de « à la manière de ». L’idée étant plutôt de s’imprégner d’un mode particulier d’expression de la pensée, de trouver en soi une voix qui y corresponde et de laisser le champ libre à cette voix. Histoire d’entendre ce qu’elle a à dire. La contrainte se limitant au vocabulaire, les relations entre les textes ainsi produits et les auteurs cités s’avèrent d’une grande élasticité et c’est ça aussi qui m’a paru intéressant : voir ce qui de moi arrivait encore à émerger…

Dans le cas de Lie-Tseu, comme le note judicieusement Mokhtar, ça a tout naturellement pris la forme d’une fable taoïste de mon cru (ce qui ne me serait certainement pas venu spontanément à l’esprit!). En voici un autre exemple, autour de Kandinsky cette fois (j'y ajoute une de mes encres qui, au départ, n'avait rien à voir avec le texte mais qui, aujourd'hui, me paraît y coller tout à fait) :



L’obscurité de l’esprit sert à désigner une force sombre, intérieurement nécessaire, la nuit qui pèse sur les âmes.


« Alors, immanquablement, un homme surgit, l’un de nous, en tout notre semblable, mais qui possède une puissance de « vision » mystérieusement infuse en lui. »
Kandinsky


Le moindre objet verra sa résonance accrue. Par son mouvement propre, un visage, un vêtement, un tableau, un arbre, une note, un incendie ou un autre spectacle épuisera toute l’action possible de l’art.

toute une vie
de lumière

samedi 5 janvier 2013

Bon, OK, on commence ça en douceur, autour de Lie-Tseu...



s’élever dans le vide sans retomber
heurter un obstacle sans rencontrer de résistance
pincer les cordes d’un instrument sans achever une mélodie

un vent frais se lève; un courant s’épanche


« Agir en temps opportun, s’arrêter en temps voulu, c’est ce que ne savent pas faire les plus sages. »
Lie-Tseu


devant la maison de Yang Tchou
un homme véritable se mit à danser
chantant fort juste
ému jusqu’aux larmes
Yang Tchou lui offrit à boire
l’homme véritable prit alors un arc de corne de Yen
et une flèche faite en jonc de Cho
il brisa la flèche
piétina l’arc
Yang Tchou rentra chez lui
honteux

Fait que c’est ça…


Je me suis finalement décidé à quitter mon statut de SBF (sans blog fixe), pour reprendre la savoureuse expression de Mokhtar ElAmraoui

J’y ai mis le temps, pas trop sûr de l’intérêt de mettre en ligne mes petites élucubrations personnelles. Mais, en même temps, à force de fréquenter assidûment plusieurs blogs, celui de Mistral d’abord, puis, de là, celui d’helenablue (à qui je dois plus qu’à tout autre de m’y mettre à mon tour) qui m’a mené à celui de Laure K et ces trois-là menant à plein d’autres (j’en ai listé un petit échantillon sur cette page); à force de fréquenter ces blogs donc, j’ai fini par me sentir un peu gêné de profiter de tout ce qu’ils partagent avec générosité en me contentant de sporadiques commentaires. Évidemment, c’est bien beau de vouloir rendre la pareille en partageant à mon tour, mais partager quoi? Je vais pas non plus sombrer dans le mimétisme là quand même…

Franchement, je sais pas trop encore ce que ce blog va devenir. Je l’ai d’abord pensé comme un espace de création, un lieu où partager mes explorations (et aussi, bien sûr, celles des créateurs qui m’allument). Au fil des ans, j’ai gribouillé des textes, griffonné des dessins, barbouillé des tableaux et depuis peu, miracle du développement technologique, je peux aussi garder des traces de mes balbutiements musicaux. Principalement destinée à mon émancipation cérébrale, cette créativité débridée, sans doute malvenue dans les espaces réservés à l’Art, était peut-être finalement parfaitement adaptée à des modes de communication encore inconnus lors de son surgissement. À voir…

Je parle d’ailleurs de l’Art, avec un grand A, sans la moindre ironie. J’aurai sûrement l’occasion d’y revenir ici, mais j’entretiens des rapports plus ou moins conflictuels avec l’art qui, pourtant, demeure à mes yeux la forme de connaissance qui me correspond le mieux (oui, oui, pour moi il s’agit bien de connaissance). Je suis un genre de cartésien mystique (mais sans dieu) dont la pensée ne s’épanouit vraiment que dans la création extatique rationnellement intégrée, mettons…

Bon, assez babillé sur le comment du pourquoi :

Bienvenue au bout de tout et advienne que pourra!